Circulation du virus émergent Mayaro en Amazonie Française

Les arbovirus constituent une menace importante et évolutive pour la santé publique. Le virus Mayaro, un alphavirus souvent cité comme un candidat probable à la prochaine grande émergence d'arbovirus, est principalement transmis par les moustiques Haemagogus des forêts aux primates non humains et à d'autres réservoirs mammifères et entraîne chez l’homme des symptômes similaires à ceux de la dengue, du zika ou du chikungunya. Si l'évaluation du risque de transmission de cet arbovirus est essentielle pour la communauté scientifique et les autorités de santé, elle est particulièrement difficile à évaluer dans les pays exposés, en raison de la réactivité croisée avec d'autres alphavirus tels que le virus chikungunya. Grace à l’étude EPI-ARBO réalisée en 2017 par l'Institut Pasteur de la Guyane pour étudier la transmission des arboviroses, les chercheurs de l’unité de modélisation mathématique des maladies infectieuses de l’Institut Pasteur avec l’unité d’épidémiologie et le Centre National de Référence des Arbovirus de l’Institut Pasteur de la Guyane ont développé une approche analytique visant à évaluer conjointement l'épidémiologie des virus Mayaro et Chikungunya ainsi que l'étendue de la réactivité croisée existant entre ces deux virus. Cette étude vient d’être publiée dans le revue scientifique Nature communication. Ils ont montré que la séroprévalence du Chikungunya a été estimée à 20,3% [18,5%-22,1%], de façon prédominante sur les zones du Maroni et du littoral Guyanais. L’étude a estimé que 2,8% [2,2%-3,4%] de la population avait été infectée par le virus Mayaro en apportant des preuves solides de l'importance du cycle sylvatique en Guyane. Les résultats obtenus montrent en effet que la plupart des infections se produisent près du réservoir naturel dans les zones rurales et chez les individus les plus susceptibles d'aller en forêt i.e. les hommes adultes, avec des séroprévalences pouvant atteindre près de 20 % dans certaines régions du Haut-Oyapock, du Haut-Maroni et de l’intérieur de la Guyane. Ces résultats soulignent la nécessité de renforcer la surveillance du virus Mayaro dans la région Amazonienne et montrent comment les approches de modélisation mathématique peuvent améliorer l'interprétation des tests sérologiques dans un contexte de co-circulation de différents virus de la même famille.

L’étude EPI-ARBO a été co-financée par les Fonds Européens de développement régional, l’Agence régionale de la Santé en Guyane et le Centre national d’Etudes Spatiales.

Hozé, N., Salje, H., Rousset, D. et al. Reconstructing Mayaro virus circulation in French Guiana shows frequent spillovers. Nat Commun 11, 2842 (2020).